Le soleil s'était couché sur Milaste, plongeant la ville antique dans un noir tombal, seul les quelques réverbères du boulevard Golias Ier Héras, donnaient une triste lueur aux rues désertes.
Autrefois, il n'y a pas bien longtemps, les fêtes et les bals donnés dans les châteaux et les manoirs des grandes familles, illuminaient la ville de milles éclats. Mais la révolution rouge, violente, sanguinaire, mis fin à ces temps à jamais!
A jamais? Certains ne pensaient pas cela, et parmi eux le jeune comte de Viorna. Ce noble de la province de Novama, était jusqu'à un passé récent, et comme tous les jeunes de sa classes, un jeune homme insouciant désintéressé des affaires politiques. Mais l'avènement de la révolution, qui emporta sa famille et fit de lui le comte de Viorna, le plongea au coeur des sombres manipulations contre le nouveau régime.
"Drapé dans un grossier manteau noir et coiffé d'un chapeau qui lui tombait sur le nez, Mikhail de Viorna traversait d'un pas pressé le grand boulevard mal éclairé en saluant au passage d'un discret hochement de tête les deux gardes révolutionnaires qui passèrent près de lui, reconnaissables par leurs bandeaux rouges autours du bras, avant de descendre une ruelle à sa gauche.
Après un long moment à marcher dans le vieux quartier milastais, le comte arriva devant une mansarde et frappa.
"Qui va là?!"
"C'est Mikhaïl, ouvre-moi mon ami."
La porte s'ouvrit avec un horrible grincement pour laisser entrevoir la silouhette fatigué mais encore solide d'un vieillard. C'était Anton, le major-d'homme du manoir des Viorna, resté fidèle à la famille et que les révolutionnaires épargnèrent car son fils était parmi eux.
"Entrez maître, on vous attend..."
En effet à l'intérieur, dans une pièce éclairé par un unique bec de gaz, attendaient une douzaine d'hommes de différentes tranches d'âges, tous des nobles que la Révolution avait dépouillés et ils portaient pour elle une haine destructrice.
Quand le comte pénétra dans la pièce, il eu parmi ces gens comme un sursaut d'émotions, entre inquiétude et espoir. Il ôta son chapeau pour découvrir les traits fins de son visage de noble et d'un air grave il harangua l'assemblée clandestine:
"Messieurs, j'ai pu m'entretenir avec son Altesse Impériale, et il est de notre côté.
Il a des alliés à Orion, des fidèles loyalistes et des mécontents du régime actuel, qui l'aideront à fuir vers Milaste pour prendre la tête de notre faction.
Son Altesse m'a assuré qu'on peut compter sur ces alliés pour la prise de la capitale."
Tandis que l'allégresse montait dans la pièce le comte Mikhaïl continuait.
"J'ai pu aussi recueillir des informations sur l'existence de groupes disparates de l'armée impériale, fidèles à la Famille Impériale et qui n'attendent qu'un signe de la part de son Altesse pour se rallier à nous".
"Messieurs, le moment est venu pour restaurer la gloire de l'Empire des Novamol!"
Et dans les ténèbres d'un Milaste déchu, retentissait comme un appel d'outre-tombe un "Vive l'Empereur" annonçant la résurrection.